De retour en Uruguay
Notre séjour en Argentine s'est conclu comme il avait commencé: par un passage au Carrefour de Gualeguaychú… non pas par amour du shopping, mais parce que nous avions faim, et que passer au supermarché nous a paru plus rapide que de manger au restaurant (nous avions encore beaucoup de route devant nous). La frontière passée, nous avons eu le plaisir de nous retrouver sur des routes peu fréquentées et bien asphaltées. Nous avions oublié comme les conducteurs de camions sont sympas en Uruguay sur les routes de province: quand ils clignotent à droite, ce n'est pas pour s'arrêter sur le bas-côté de la route, c'est un gentil signal pour indiquer à la voiture derrière eux "c'est bon, la voie est libre, tu peux me doubler!"
Nueva Helvecia - un village suisse en Uruguay?
Nous avons roulé et roulé jusqu'à Nueva Helvecia (anciennement appelé "Colonia Suiza"), un village où des Suisses étaient venus s'installer il y a déjà bien longtemps, et qui continue à mettre fièrement en avant ses racines helvétiques. Il est connu pour sa production de fromages et perpétue certaines traditions. Il était déjà tard quand nous sommes arrivés, et la pluie et l'orage s'annonçaient. Nous avons beaucoup apprécié de pouvoir poser nos matelas à l'intérieur dans une salle attenante à la piscine de l'hôtel-camping. Nous avons quand même monté les tentes entre les tables de ping-pong parce qu'il y avait plein de moustiques!Nous n'avons malheureusement pas vraiment pu visiter le village, car il pleuvait des trombes d'eau. La seule chose que nous pouvons noter, c'est que nous étions bien dans un village d'Uruguay, et que nous n'avons pas ressenti l'atmosphère suisse si fièrement vantée… une autre fois, peut-être?
De retour chez Magdalena
Comme il s'était avéré impossible d'organiser dès le mois de décembre un logement pour mars à juillet (qui pense aussi longtemps à l'avance?…) nous avons à nouveau débarqué chez Magdalena et son fils pour une durée indéterminée.J'ai eu le plaisir de constater que j'avais progressé en espagnol - sans rien faire - car je n'ai quasiment plus eu besoin de l'anglais. Je pense que le secret réside dans l'art de la périphrase, une technique très précieuse pour progresser sans trop d'efforts. Quand il me manque un mot, hop, une périphrase bien choisie et l'interlocuteur devine le mot. Il ne me reste plus qu'à l'enregistrer dans ma mémoire pour la fois suivante (même si ça, ça ne marche pas toujours du premier coup ;-). Et cette technique est aussi diablement efficace dans l'autre sens! Si mon interlocuteur dit quelque chose que je ne comprends pas, hop, je lui demande de m'expliquer LE mot-clef de la phrase, et tout à coup (c'est magique!) la phrase s'éclaire et devient compréhensible.
La "casa de Magali et Martín"
En décembre, Magdalena avait entrepris un chantier juste à côté de la maison: construire deux petites chambres avec leur salle de bain attenante pour les hôtes Airbnb. Autant dire que c'est fait de façon très artisanale, mais ça a l'avantage que les enfants peuvent sans problème participer.
Ils ont adoré remuer le mortier, en enduire les briques et voir les murs prendre forme à mesure que lesdites briques étaient posées les unes à côté des autres. Martin a étudié avec beaucoup d'intérêt le plan des chambres. Et Magali a passé des heures les mains dans le mortier… Pour tous deux, quel bonheur de s'imaginer être en train de construire chacun leur chambre!
Magdalena était fière de leur montrer l'avancée des travaux de ce que nous appelons tous désormais "la casa de Magali y Martín". Elle avait en effet bien avancé!
Ici, nous entendons beaucoup de gens parler de la difficulté qu'ils ont à trouver des ouvriers qui travaillent bien et de bons matériaux de construction. Il y a ceux qui payent une entreprise pour construire la maison et l'entreprise s'en va avec l'argent. Ceux qui se retrouvent à payer deux fois car les ouvriers sous-traités par l'entreprise n'ont pas été payés par celle-ci et la loi oblige dans ce cas le propriétaire à payer les ouvriers quand même. Et ceux qui emploient des ouvriers qui donnent (ou pas) le meilleur d'eux-mêmes, pour un résultat malheureusement peu satisfaisant. Les meilleurs matériaux ne servent pas à grand-chose s'ils sont installés de façon approximative (et les toilettes sont là un excellent exemple: il suffit de voir le nombre d'endroits où les portes des sanitaires ont été montées de travers… même les toilettes de l'élégant café Tortoni à Buenos Aires ne ferment pas: on voit aux nombreux trous de perceuse que l'ouvrier s'est acharné puis a fini par capituler). Les standards de construction sont donc la plupart du temps très différents de ce que nous connaissons en Europe et les gens comme Magdalena qui décident de faire le travail eux-mêmes ne le font pas seulement par souci d'économie, mais aussi parce que prendre des ouvriers, c'est parfois ouvrir son chantier et son porte-monnaie à une cascade de complications.
Chiquitita, une petite chienne qui a conquis tout le monde
Une autre surprise qui a beaucoup plu aux enfants: la présence d'une jeune chienne abandonnée et toute amaigrie qui a débarqué un jour ici et décidé de s'installer. L'autre chien de la maison semblait apprécier sa compagnie, et les enfants l'ont tout de suite adorée, jouant longuement avec elle et la baptisant très vite "Chiquitita" (idée de Martin). Nous préférons dormir dans les tentes pour ne pas être embêtés par les moustiques, et une nuit elle est venue se réfugier entre les deux toiles de notre tente pour être tout près de nous car elle avait peur de l'orage. Si nous ne repartions pas en juillet pour la Suisse, je pense que nous l'aurions adoptée…Nous nous sentons à chaque fois en famille ici, et nous avons passé plein de bons moments. Par contre, il a beaucoup plu, ce qui compliquait le quotidien, car la maison n'est malheureusement pas très étanche: l'eau goutte à l'intérieur en plusieurs endroits, et il faut sans cesse éponger ou enjamber des flaques, faire attention où l'on pose les objets qui craignent l'eau, etc. Réparer le toit est probablement le prochain chantier!
Le ciel est-il une œuvre d'art?
Ici, la beauté de la nature m'interpelle, et le ciel tout particulièrement m'impressionne. Les nuages offrent un spectacle sans cesse renouvelé, peignant le ciel de formes et de couleurs éphémères - c'est un tableau unique et perpétuellement en mouvement.
Je me souviens d'une dissertation en prépa littéraire qui avait pour sujet "Qu'est-ce que le beau?" Nous avions étudié Kant et j'avais trouvé intéressante l'idée que le beau soit ce qui plaît universellement sans concept. Je ne peux en effet pas imaginer que l'on puisse trouver ces nuages moches! Et ils me touchent autant qu'une œuvre d'art même s'ils sont seulement une création de la nature…