Connaître du monde et s'intégrer socialement (nos activités)

L'école - un excellent outil d'intégration pour les enfants…
Après trois mois d'école, les enfants ont passé un cap et ils se sentent désormais beaucoup plus à l'aise: c'est fascinant de voir comme ils se sont adaptés! Vers début novembre, ils se sont mis tous les deux à oser communiquer verbalement en espagnol… et depuis c'est une véritable explosion linguistique! Non seulement ils comprennent "un montón" - comme dirait leur maîtresse - mais surtout ils s'expriment désormais abondamment et à voix haute (et non plus timidement en chuchotant). Martin est devenu très bavard: fini le temps où il ne comprenait rien et ne voulait pas aller à l'école. Désormais, il peut aussi bien s'enquérir des goûts culinaires de ses copains ("¿Te gusta el chocolate negro? Es muyyyy rico") que communiquer ses envies ("¿tu me lo regalas?" - "tu peux m'offrir ça?").

… et pour les parents!
Nous pouvons remercier l'école pour toutes les interactions sociales qu'elle nous offre, car quand on arrive dans un pays où l'on ne connaît personne et où l'on ne s'intègre pas par le travail, l'un des défis auxquels on est confronté, c'est de développer son réseau social. Grâce à l'école et au réseau actif des parents d'élèves, nous avons pu très vite rencontrer du monde. Bien sûr, rencontrer ne veut pas dire tout de suite tisser des liens profonds, mais on peut passer de bons moments et il y a déjà quelques personnes dont on est plus proches. Quand on nous propose des activités culturelles, on fonce, et on est ainsi allés voir une pièce de théâtre à Maldonado (où je n'ai compris que les très grandes lignes, mais ce n'est pas grave, c'était très cool quand même - les comédiens jouaient bien!) Sinon, nous profitons de toutes les opportunités, qui ne sont pas forcément les mêmes pour Michael et pour moi, car les hommes ont tendance à faire des activités entre hommes, et les femmes entre femmes.

Conception collective de costumes pour l'école
Récemment, avec des mamans de la classe de Martin, nous avons été occupées par la confection des costumes pour le spectacle de fin d'année: la couturière rigoureuse que je suis a été assez stupéfaite par la façon très artisanale et approximative de procéder, mais la bonne humeur et l'enthousiasme des autres pour découper le tissu doré ont été communicatifs. Le résultat est trois fois trop grand, le tissu (très sensible) se déchire déjà, et devoir à cause d'un mauvais calcul assembler une multitude de petits bouts d'entoilage parce qu'il en manquait m'a laissée perplexe, mais pour le quart d'heure où le costume d'étoile devra faire bonne figure, ça devrait (espérons!) tenir…

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Nous faisons ici des choses que nous ne ferions jamais en Suisse, comme jouer au foot…
Nous sommes ouverts à essayer de nouvelles choses, juste pour rencontrer du monde: par exemple, le mercredi soir, une dizaine de pères d'élèves se retrouvent pour jouer au foot et boire une bière. Malgré un intérêt très (vraiment très!) limité pour le foot, Michael a sauté le pas et participe désormais aux rencontres de ce groupe au nom évocateur (groupe WhatsApp "Fútbol o muerte"). Rejoindre des fans de foot qui jouent régulièrement quand on est novice, je trouve que c'est vraiment un acte courageux! Autant dire qu'il n'a pas l'impression de briller sur le terrain et qu'il ne s'en sort pas sans courbatures… mais il s'amuse beaucoup malgré tout!

… ou faire la fête jusqu'à 3h du matin
Pour ma part, une fois par semaine je vais à un cours de yoga histoire de m'étirer un peu (et de pratiquer mon espagnol, car ça commence et finit toujours par des papotages…) Et je saisis les occasions qui se présentent, même quand elles m'obligent à sortir de ma zone de confort… mon dernier effort social date de samedi dernier, quand j'ai participé à une soirée d'une quinzaine de mamans et que j'ai découvert que même avec un enfant de 5 ans à la maison, il y a des chicas qui ont l'énergie de faire la fête et de discuter jusqu'à 3 heures de matin! Je n'ai pas souvenir d'avoir jamais fait la fête jusqu'à une heure pareille, à part éventuellement pendant les nuits blanches à Saint-Pétersbourg quand il faisait encore jour jusqu'à minuit. Bref, nous étions en cercle sur des chaises de plage autour d'un feu de camp, et l'ambiance en soi était très sympa, mais après 1h du matin, je n'étais plus vraiment en mesure de l'apprécier à cause du sommeil :-) Suivre les conversations d'un grand groupe est déjà plus difficile qu'une conversation en face à face avec seulement un ou deux interlocuteurs, alors quand Morphée m'a tendu ses bras, j'ai cessé de m'accrocher pour comprendre et je me suis laissée bercer. Je suis sûre que plus je suis exposée à la langue, plus mon espagnol va s'améliorer, mais la prochaine fois, j'irai quand même avec ma propre voiture pour pouvoir rentrer à une heure plus convenable, parce que le lever de Martin, c'est à 6h du matin!…

J'apprécie beaucoup la gentillesse des gens ici, qui sont facilement abordables et se donnent parfois beaucoup de mal pour m'aider à comprendre en essayant de me résumer ce dont ils viennent de parler avec des mots plus simples. C'est très appréciable! Mon espagnol reste très basique et les verbes sont mon cauchemar, mais ça vient… il faut dire que je n'ai pas vraiment le choix si je veux communiquer avec les gens, car peu parlent anglais.

Le club d'échecs
Une fois par semaine, les enfants vont au club d'échecs pour enfants de Punta del Este. C'est un club qui a été fondé il y a une année par quelques parents motivés et plutôt fortunés. Les rencontres n'ont pas toujours lieu au même endroit, et les locaux sont parfois franchement déconcentrants: la vue sur la mer est un minimum, quand ce n'est pas la terrasse du 24e étage de l'hôtel "Bella vista" ou les fauteuils en cuir d'un club de tennis luxueux. Bref, grâce au club d'échecs, on va dans des endroits où on ne mettrait sinon jamais les pieds… c'est vrai que Punta del Este est une ville à l'ambiance particulière: pratique pour les services qu'elle offre, mais agaçante avec ses gratte-ciels conçus pour en mettre plein la vue. En janvier, elle devient paraît-il délirante - ce n'est pas la station balnéaire de la jet-set pour rien…

16_3_7CR03468blog.jpgPunta del Este vue depuis l'hôtel "Bella Vista"

Les rencontres d'échecs pour enfants ne sont toutefois ni chères ni snobs. Il n'y a pas vraiment de cours structuré, en tout cas pas à chaque fois, et quand c'est pour les adolescents de niveau avancé on n'en saisit de toute façon pas la quintessence. Bref, on vient avant tout pour jouer. L'ambiance est très conviviale et il y a en général du jus et des biscuits à disposition, ce qui affecte énormément la concentration de Martin… Magali joue avec grand plaisir contre des joueurs de tous niveaux, et Martin (qui est de loin le plus jeune) joue de préférence contre moi ou contre certains enfants dont il sait qu'il peut éventuellement exploiter des erreurs d'inattention car il n'aime pas perdre :-D

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Le tango
Les dimanches soirs, nous allons au tango Michael et moi - ça fait plaisir de sortir à nouveau danser maintenant que les enfants sont un peu plus grands! La salle est toute petite, avec un grand balcon qui donne sur la station-service (très romantique :-D ). L'ambiance de la pratique (et du cours quand il y en a un) est très conviviale, mêlant des personnes de tous niveaux qui viennent comme elles sont, pas forcément tirées à quatre épingles. On danse ici aussi bien en talons qu'en Converses, en chaussures de danse ou en chaussures de ville, et on recherche avant tout à passer un bon moment où l'abrazo et la musicalité priment sur les figures. Avec Michael, on danse beaucoup tous les deux, mais aussi avec d'autres, et c'est une soirée qui nous apporte beaucoup et qu'on apprécie chaque semaine.

Il y a un cliché tenace que le tango serait une danse macho où l'homme est celui qui mène la danse et la femme celle qui suit. Si c'était le cas, j'aurais fui depuis longtemps! :-D C'est en réalité une danse d'improvisation qui repose sur une connexion à la fois physique et émotionnelle - qui peut être très intense - entre les deux partenaires. Cela demande d'être très à l'écoute de l'autre et de la musique. Sentir et soutenir les impulsions du partenaire, s'exprimer et interpréter la musique, se fier à son ressenti et se donner complètement et en toute confiance dans le moment présent pour créer une danse unique. Profiter des moments de suspension ou de transition qui sont autant d'espaces d'expression. Profiter de cet instant hors du temps et du bien-être que procure une belle étreinte.

Quelques remarques sur la façon de communiquer
Je constate qu'ici on utilise beaucoup plus le contact physique pour montrer son affection aux autres. Les adultes vont facilement faire un câlin aux enfants… si la maîtresse a été absente une demi-journée, la moitié de ses élèves va se jeter à son cou à son retour pour lui montrer comme ils sont contents de la revoir… et les enfants se font souvent des câlins entre eux juste pour se montrer qu'ils s'aiment bien.

Les gens sont plus expansifs qu'en Suisse, et ça se traduit en mots par un lexique très développé pour exprimer l'enthousiasme. Ici, on utilise à longueur de journée des adjectifs qui en français paraîtraient exagérément positifs par rapport à la situation à laquelle ils se rapportent. Voici quelques expressions et adjectifs couramment lus et entendus: "Qué bueno! Qué lindo! Me encanta! Hermoso! Estupendo! Precioso! Divino! Genial! Bárbaro! Buenísimo! Perfecto! Tremendo! Fenomenal! Espectacular! Increíble!" Le dernier que j'ai appris - pendant la fameuse soirée de filles - c'est "estoy copada", un argentinisme à utiliser la prochaine fois que je voudrai m'extasier… pour m'émerveiller sur les costumes d'étoiles, peut-être?